Discours d’Obama et chute des marchés : prétexte ou moyen de pression ?

Il est amusant de voir que quelques jours à peine après notre critique du système financier actuel (et avec lui de nos hommes politiques), incapable de tirer les leçons de la crise, Mr Obama s’est fendu d’un discours bien senti contre le secteur bancaire. Un discours qui a notamment porté sur la limitation de la spéculation et de la taille des établissements financiers, et en quelques sortes un partage des genres et un retour en arrière, avec d’un côté les banques d’affaire et d’investissement, et de l’autre les banques de détail. Un discours qui a, si on en croit les médias, provoqué la chute de ces derniers jours.

Rappelons que les banques étaient encore séparées en deux il y a une dizaine d’années seulement, avant que le « Glass-Steagall Act », qui instaurait entre autre une incompatibilité entre les métiers de banque d’investissement et banque de dépôt, et qui avait été mis en place suite à la crise de 29, ne vole en éclats fin 99. Une abrogation qui a conduit à la dérégulation générale et la naissance de géants de la finance, aboutissant moins de 10 ans plus tard à la plus grave crise depuis 29 !

Les banques se font taper sur les doigts

Cela fait bien longtemps que je soulève le problème de banques qui ne font plus leur métier de banquier, d’effets de levier démesurés et à seul but spéculatif, de produits dérivés qui peuvent recueillir plus de fonds que leur sous-jacent et qui n’ont plus le rôle de simple couverture qu’ils auraient toujours dû avoir. Cela fait bien longtemps que je soulève le problème des conflits d’intérêts et d’un système aux mains du lobbying bancaire, qui veut qu’une banque peut être à la fois juge et parti, donner des avis tranchés sur telle ou telle valeur alors qu’elle est elle-même impliquée sur les marchés. Que font les autorités de marché ? Pas grand chose en tout cas, mais les politiques semblent s’y mettre. Et si toutes ces dérives ne seront sans doute pas réglées par la seule volonté d’Obama, ce projet semble aller dans le bon sens, et n’est d’ailleurs pas sans rappeler les actions évoquées par Jacques Attali dans son ouvrage « La crise, et après ? »

Obama souhaite notamment restreindre de façon drastique les possibilités qu’on actuellement les banques de jouer sur les marchés pour leur propre compte plutôt que pour celui de leurs clients : « Les banques ne seront plus autorisées à détenir ou à investir dans des fonds spéculatifs pour leur propre compte », a t’il déclaré.

Est-ce à dire que les banques feront passer les intérêts de leurs clients avant leur propre intérêt, et qu’elles ne continueront pas à faire porter les risques par ses seuls clients ? N’allons pas trop vite en besogne, et ne rêvons pas trop non plus. Pourquoi d’ailleurs vouloir moraliser un système et rompre un ordre tellement bien établi que les clients eux-même ne semblent pas s’en plaindre, doivent se dire les grands argentiers de la planète ?

Mais si c’est sans doute par ignorance que les clients ne disent rien, étouffés par le monopole de ces fameux grands établissements financiers, et car ils ne savent pas qu’il existe des alternatives et des gérants qui partagent les risques avec leurs clients, des gérants qui ont conservé un réel sens du devoir et du service (comme votre serviteur J ), rien ne dit qu’ils vont rester dans la passivité encore longtemps, et peut être est-ce finalement un bien à terme pour les banques elles-même.

Eviter une nouvelle crise financière

Quoiqu’il en soit, il semble que les mesures que souhaite prendre Obama aillent dans le bon sens. Comme l’a déclaré le secrétaire général de l’OCDE, Angel Gurria, elles peuvent permettre de « résoudre plusieurs risques majeurs inhérents au système financier actuel« .

Et si c’est n’est peut-être qu’un moyen qu’à trouvé Obama pour faire remonter sa cote de popularité, comme le disent ses détracteurs, on ne peut que reconnaître qu’il s’agit là d’une décision courageuse et pleine de bon sens, en ces temps où l’on a parfois l’impression que tout repart comme avant pour les banques, comme si la crise n’avait pas eu lieu, comme si elles pouvaient à nouveau se permettre de jouer avec le feu, puisque après tout, l’état et les banques centrales seront toujours là pour les remettre sur pied !

Un décision qui a en tout cas coïncidé avec un vif décrochage de Wall Street et des marchés mondiaux par ricochet. Serait-ce en fait une mauvaise nouvelle pour l’économie ? Est-ce peut-être qu’une simple coïncidence, ou y a t’il un lien de cause à effet ?

Le décrochage des marchés : prétexte ou moyen de pression ?

Si les médias se sont emparés de l’affaire, et lui ont mis sur le dos le violent repli enregistré sur les bourses mondiales, il peut ne s’agir que d’un simple prétexte. Un prétexte pour des marchés arrivés justement sur d’importants niveaux de résistance, comme nous l’avions signalé deux jours auparavant seulement, et qui avaient besoin d’une purge. Mais on ne peut exclure non plus qu’il s’agisse d’un moyen de pression de la part des grands argentiers de la planète contre le projet d’Obama.

Car comment justifier un repli aussi vif par cette seule nouvelle ? En quoi une restriction de la spéculation, et un retour à des banques qui font leur travail de banque pourrait-il nuire à la santé des entreprises cotées et de l’économie en général? Si je suis bien placé pour savoir que les fondamentaux ne régissent pas les variations à très court terme des marchés financiers, il est bien difficile de savoir où se situe la vérité.

Et si l’idée d’un simple prétexte pour provoquer une consolidation des marchés tient la route, l’idée que les banques menaceraient Obama d’une nouvelle déroute sur les marchés, pour mieux le faire reculer, est tout aussi crédible.

Obama n’a t-il pas d’ailleurs averti par avance les banques que ce n’était pas la peine qu’elles mettent au travail leur armée d’avocats pour lutter contre ces mesures ? Si les banques « veulent se battre, je suis prêt », a t’il déclaré. C’est bien qu’il avait perçu (ou déjà reçu ?) des menaces de leur part… Les banques pourraient en tout cas avoir trouvé un autre moyen de pression, dans une partie de poker qui promet pour les semaines et mois à venir…

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