Bulles et krachs : l’éternel recommancement ?

La bulle immobilière de ces dernières années, suivie d’une bulle au printemps sur les matières premières, puis le krach qui a suivi est l’occasion de faire un petit retour en arrière sur les précédents évènements similaires.

Et cela ne remonte pas aux débuts des marchés financiers, mais bien avant, puisque la première bulle identifiée et sur laquelle nous avons un certain nombre d’informations est la bulle des tulipes, qui remonte au XVIIe siècle !

Ainsi, en 1636, une fièvre acheteuse s’était emparée des bulbes de tulipes en Hollande, faisant grimper le prix des plus rares à l’équivalent du prix d’une maison, ou encore 40 années de salaires d’un ouvrier. Jusqu’à ce qu’en février 1637, la bulle n’éclate, faisant s’effondrer le prix des tulipes de 90% en quelques semaines, puis à nouveau de 80% (soit 98% sur le prix de départ). La première bulle recensée de l’histoire venait d’éclater, la première d’une longue liste, comme si les hommes n’apprenaient pas de l’histoire.

Et ce ne sont pas les exemples qui manquent ,avec un siècle plus tard la faillite de la South Sea Company, ou deux siècles plus tard, en plein boom des chemins de fer, avec le doublement des actions du secteur en Angleterre en 1836/1837, puis à nouveau en 1844/1845, avant que la bulle n’éclate.

Ce qu’il est intéressant d’analyser, ce sont les points communs entre ces bulles. Le plus souvent, elles sont nées de révolutions économiques ou industrielles. Toutes les grandes innovation n’ont pas conduit à des bulles comparables, mais comment ne pas mentionner le krach de 1929, né de l’avènement de l’automobile et de l’incroyable surproduction qui a suivi, et bien sûr la fameuse bulle internet, qui a porté le Nasdaq notamment sur des plus hauts historiques qu’il ne semble pas prêt de revoir avant de très longues années. Un phénomène que l’on retrouve également avec la bulle pétrolière et des matières premières de ces derniers mois. Cette dernière a reposé sur le fort développement des marchés émergents et une réorganisation de l’économie mondiale, qui ont mis en lumière la raréfaction à venir des ressources de notre planète.

Mais si l’on ne peut nier l’importance des bouleversements associés à ces révolutions économiques, ces phénomènes restent des phénomènes de long terme, et qui ne peuvent justifier les exagérations court terme des marchés. Tôt ou tard, ces bulles finissent donc par éclater.

Toutes ces bulles ont été caractérisées par l’afflux d’une masse d’investisseurs moutonniers, souvent inexpérimentés et attirés par l’appât d’un gain facile. On se souviendra des publicités en 1999 et 2000 qui mettaient la bourse et la richesse à portée de tous, ou encore plus récemment ces nombreuses émissions montrant comment retaper une vieille maison pour faire la culbute quelques mois plus tard lors de la revente.

Elles se traduisent également, lors de leur dégonflement, par une une mise au pilori des dirigeants et accusation des instances règlementaires, et une multiplication des scandales, fraudes et faillites. On citera en pagaille Drexel Burnham Lambert en 87, le fond LTCM en 98, ou encore les scandales WorldCom et Enron en 2002/2003. Et puis bien sûr les faillites et difficultés en cascade des établissements financiers en cette année 2008, avec BearStearns, Lehman Brothers, AIG et j’en passe. Le marché a besoin de boucs émissaires pour expier ses péchés, et mieux repartir de l’avant, dans la bulle suivante.

Mais chaque bulle conserve ses propres spécificités, qui font justement qu’elles peuvent se développer et gonfler, échappant ainsi à la vigilance de tous ceux qui se sont déjà fait prendre et ont juré que cela ne leur arriverait plus.

Ainsi, pour celle que nous venons de vivre sur l’immobilier américain, s’il n’y a pas grand chose à dire sur la bulle elle même et son éclatement, c’est plus sur ses conséquences sur les marchés financiers qu’il convient de s’attarder. En effet, ce qui a pu surprendre, c’est que jamais un tel repli des bourses n’était parti de niveaux de valorisation aussi peu excessifs, puisque la hausse des marchés entre 2003 et 2007 n’était d’une part qu’un rattrapage de la chute de 2001/2002, et d’autre part l’accompagnement de la croissance des bénéfices et l’assainissement de la situation des entreprises. Les prix excessifs étaient sur l’immobilier, mais ne s’étaient dans leur ensemble que peu propagés aux marchés financiers.
Une autre spécificité de la crise actuelle, et non des moindres, est que nous avons eu en fait plusieurs bulles concomitantes. Tout est partie d’une bulle du crédit, provoquant une bulle immobilière, alimentant à son tour la bulle du crédit, compte tenu du fonctionnement même de l’endettement outre-atlantique. A cela est venu s’ajouter une bulle sur les matières premières, due au fort développement des pays émergents et de l’Inde et la Chine en particulier, et renforcée sur le premier semestre 2008 par un fort mouvement de spéculation de la part d’investisseurs cherchant à compenser le recul des marchés actions. Et c’est l’éclatement de cette troisième bulle qui aura l’effet le plus dévastateur, sur des marchés déjà très fragilisés. Quant à savoir quand cette crise trouvera un épilogue… Même si ce n’est pas le sujet du jour, dans un marché qui a perdu ses repères et toute confiance, et dans lesquels les prix n’ont plus de sens, le marché se montrant incapable de valoriser les sociétés, sans doute faudra t’il donc déjà que le marché règle le problème de la titrisation et de la valorisation des actifs avant de pouvoir regarder de l’avant…

Quelle sera ensuite la prochaine bulle, et quel sera le facteur déclenchant de son éclatement ? C’est tout un programme, mais si bulle il y a, c’est sans nul doute que personne ou presque ne l’aura vu venir… 😉

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