La guerre Etats Unis – Europe s’intensifie !

Après une victoire laborieuse mais réelle de l’Europe face aux Etats-Unis sur le dossier grec, dans la guerre qui oppose les banques d’affaires et les agences de notation américaines à l’Europe, c’est une nouvelle offensive à laquelle nous avons assisté ce mardi soir, avec la dégradation de 4 crans de la note du Portugal par l’agence Moody’s!

Une offensive à laquelle a immédiatement réagit la commission européenne, visiblement excédée par le comportement des agences de notation (voir cet article). Il faut dire que ce n’est pas la première fois. Nous avions d’ailleurs déjà poussé un petit « coup de gueule » début 2010, à propos de « ces agences de notation qui font la pluie et le beau temps sur les marchés« .

Mais pour bien comprendre le contexte de cette guerre Etats Unis – Europe, avec en jeu la crédibilité et l’unité européenne (ce qui n’est pas gagné), et bien sûr la place de l’euro, il faut revenir quelques années en arrière, et la création des fameux CDS (Credit Default Swap), qui ont déjà défrayé la chronique lors de la crise de 2008!

Nous ne reviendrons pas dans l’implication des agences de notation et banques d’affaire américaines dans le maquillage des comptes grecs, et les conséquences que l’on connait, nous ne parlerons pas non plus de l’endettement américain, à peine écorné pour le principe par une agence américaine en avril dernier, alors que les Etats Unis pourraient se retrouver en défaut de paiement dans quelques jours si le congrès ne parvient pas à se mettre d’accord sur le relèvement du plafond de la dette américaine (quand on demande à l’Europe des plans d’austérité drastiques…).

Nous nous focaliserons juste aujourd’hui sur ces fameux CDS, dont ce sont gavées les banques d’affaire américaines, et notamment Goldman Sachs, directement impliquée dans le scandale grec. Des CDS qui sont pour faire simple des assurances contre le défaut de paiement. Autrement dit, si la Grèce venait à faire défaut, ces CDS permettraient aux banques d’affaire américaines de percevoir des primes collosalles, tandis qu’un redressement de la Grèce reviendrait à faire perdre toute valeur à ces fameux CDS.

On comprend mieux l’acharnement des banques d’affaires et avec elles des agences de notations (qui ne vivent que grâce à ces mêmes banques qui les rémunèrent… vive l’indépendance!) à dégrader à tour de bras les notes des pays les plus fragiles de la zone euro, d’autant que se joue également derrière tout ceci la place de l’euro dans le monde. Un euro qui était sur le point de supplanter à brève échéance le dollar il y a à peine 3 ans, lorsque les pays de l’OPEP commençaient déjà à évoquer une cotation du baril en euros… Une terrible offense et un terrible coup pour les américains, accrochés à leur sacro-saint dollar et surtout très présents sur le marché du pétrole.

Sans qu’il n’y paraisse, c’est donc une guerre importante que sont en train de se livrer américains et européens, par agences de notation et banques d’affaires interposées. Une guerre qui pourrait d’ailleurs sembler perdue d’avance entre la toute puissante finance américaine d’un côté, et une Europe politique et économique désunie et mal organisée de l’autre. Ce serait sans compter sur le fait que nous avons du côté européen des combattants qui sont aussi ceux qui font les lois… Il est dans ces conditions bien plus facile de combattre, en changeant en cours de route les règles du jeu. C’est d’ailleurs ce qui pourrait sauver l’Europe, avec en prime le soutien implicite du FMI, toujours dirigé par un Européen malgré l’éviction de DSK (là aussi, comment ne pas y voir l’ombre des banques d’affaire, même si bien d’autres avaient intérêt à le voir chuter). On mentionnera également  la relative discrétion du gouvernement Obama dans cette histoire (l’histoire aurait certainement été différente avec un républicain à la tête de l’état), qui rend donc l’issue de ce combat bien plus incertaine qu’il pourrait y paraître.

La bataille promet en tout cas d’être longue, et ce sont probablement les marchés qui risquent d’en faire les frais (et bien sûr certaines populations européennes, même si un peu de rigueur ne fera pas de mal à terme). Mais ne l’oublions pas, la bourse valorise avant tout les entreprises, qui sont dans une situation bien plus saine que les états, tandis qu’un euro sous pression favorise globalement nos entreprises européennes. Ce serait donc aller un peu vite en besogne que de miser sur un repli des marchés pour les mois à venir, avec une situation qui semble être déjà globalement bien « pricée » par les marchés et qui pourrait expliquer des niveaux de valorisation inférieurs à la moyenne historique.

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